Published 17 décembre 2025 Commentaires 0 Commentaire Par Eric Mabille Tags Art urbainFranceFresque commémorative attentats de Paris 2015Léa BelooussovitchParisvendredi 13 novembre 2015 Étreinte de l’ombre et de la lumière : Léa Belooussovitch transcende le souvenir des attentats de Paris Au 19 rue Léon Frot, une vibration chromatique vient de surgir sur la pierre. Pour honorer les dix ans des attentats de Paris 2015, l’artiste Léa Belooussovitch signe ‘ Paris, France, vendredi 13 novembre 2015’, une œuvre monumentale née du désir des survivants. Entre pudeur et lumière, ce mur devient un refuge visuel où l’art prend le relais du silence. L’étreinte du flou : une résilience à fleur de mur Léa Belooussovitch a fait éclore une ‘Bulle d’art’ sur le flanc du 11e arrondissement. Bien plus qu’une fresque mémorielle, elle installe ici un rempart contre l’oubli. Dix ans après les stigmates qui ont marqué à jamais le cœur de la capitale, cette silhouette vaporeuse s’élève au 19 rue Léon Frot comme une réponse à la brûlure vive du souvenir. Peut-on contempler l’insupportable sans être happé par la violence ? L’art possède-t-il le pouvoir de transmuer une blessure historique en un souffle de vie ? C’est le défi de cette paroi de 23 mètres de haut, inspirée d’un cliché de rescapés dont l’évanescence ne cherche pas à occulter le drame, mais à en panser la mémoire. Toute la force de cette œuvre repose sur un parti pris de pudeur évanescente. Sollicitée par la Ville de Paris à l’initiative d’une survivante, Léa Belooussovitch choisit d’éluder l’iconographie du chaos au profit d’un souffle d’apaisement. Tout part d’un instantané saisi dans l’urgence : un couple de rescapés, blotti au creux d’une couverture de survie. Ce symbole de réconfort universel, Léa Belooussovitch le transcende pour en faire une allégorie de la fraternité. Si le titre ancre la création dans la précision tragique de cette soirée d’automne, son traitement esthétique vaporeux l’élève vers une dimension intemporelle, offrant une respiration salvatrice là où le pignon de l’immeuble était autrefois une surface aveugle. Du choc à l’allégorie à l’acceptation du regard Par un recadrage maximal, l’artiste restaure l’anonymat et la dignité des êtres. Elle zoome au plus près de la matière pour diluer l’image et ses stigmates en une éclosion de couleurs vaporeuses. En isolant ces deux corps unis dans un soutien mutuel, elle transmute le drame collectif en une émotion universelle. Fidèle à sa démarche, Léa Belooussovitch délaisse la brutalité du factuel pour cette abstraction vibrante qui rend le sujet enfin ‘regardable’. Loin du tumulte visuel des écrans, elle offre une halte contemplative où la vibration de l’instant l’emporte sur l’effroi. Défier la verticalité : une prouesse technique et collective Transposer la délicatesse d’un dessin sur feutrine à l’échelle du paysage urbain relève du prodige. Cette fresque monumentale est née d’une synergie chorégraphiée entre l’artiste, la Ville de Paris et les associations de victimes, dont le regard bienveillant a porté chaque étape du projet. Sur l’échafaudage, la créatrice a fait corps avec les artisans d’Hyper Mur, unissant sa vision à leur savoir-faire pour dompter le souffle de l’aérosol. Ensemble, ils ont élaboré un protocole méticuleux afin de restituer le velouté de l’œuvre originale. Grâce à une palette de 45 pigments, ils ont sculpté une perspective atmosphérique où les tons diaphanes ouvrent, enfin, une échappée vers la clarté. Une fenêtre sur la ville : entre recueillement et silence Désormais nichée entre les fenêtres de 250 habitations, la fresque s’inscrit avec douceur dans le quotidien des riverains. La bande blanche qui borde la composition dépasse le simple rappel au négatif argentique ; elle agit comme un silence visuel, une ponctuation indispensable dans la densité du bâti. En s’élevant à quatre mètres du sol, l’œuvre ménage un espace libre, prêt à accueillir les témoignages spontanés des passants. Sous le regard des habitants, la pierre se mue en une enveloppe protectrice qui semble, avec une infinie délicatesse, habiller l’immeuble. Une éclosion évanescente contre l’oubli Ce choix d’esthétique rend le motif à la fois présent et fugace, à l’image des meurtrissures psychiques qui, à l’inverse des plaies physiques, demeurent souvent invisibles. Pour ceux qui ont traversé l’épreuve, ce langage visuel permet de côtoyer l’indicible sans être assailli par le passé. En se faisant la passeuse de ce que les mots peinent à dire, Léa Belooussovitch offre une respiration où le sens naît de l’interprétation de chacun. Cette intervention, pierre angulaire d’un parcours mémoriel plus vaste, affirme que dix ans plus tard, l’art demeure le vecteur ultime de notre persévérance collective. BOOMBARTSTIC, l’Instant du Regard Gardienne d’une mémoire encore vive, la fresque de Léa Belooussovitch s’élève moins comme une image que comme un souffle. Dix ans après que l’horreur a tenté de figer Paris dans l’effroi, cette œuvre, inaugurée le 12 novembre, s’impose comme une parenthèse de silence dans le tumulte urbain. Une audace de la retenue : là où le street art crie souvent sa révolte, Léa Belooussovitch choisit le murmure du flou pour dire l’indicible, transformant une archive de rescapés en une apparition vaporeuse qui semble sourdre du mur lui-même. Ce passage tant magistral que sensible du feutre à la paroi, où la tension caractéristique de l’artiste — ce dialogue troublant entre la violence d’une source photographique et la douceur presque sacrée de sa retranscription — trouve une résonance monumentale. Ce choix du retrait visuel agit comme un sanctuaire du regard, évitant l’écueil du voyeurisme pour privilégier une forme de « survivance » émotionnelle. Une œuvre qui refuse l’évidence du récit, pour la pertinence de ce ‘flou mémoriel’ dans lequel chaque passant loge sa propre peine, ses souvenir dans les interstices de la couleur, faisant de la fresque un miroir collectif plutôt qu’un monument figé. Au-delà du simple hommage aux victimes directes et indirectes, cette intervention interroge le rôle de l’art public face au traumatisme. En confiant la mémoire du 13 novembre à une esthétique de l’effacement et de la réapparition, l’artiste propose une réflexion profonde sur la persistance des traces. Ce n’est plus seulement un événement que l’on commémore, mais la fragilité humaine que l’on magnifie, offrant au marcheur de 2025, ce moment d’arrêt et de contemplation où le souvenir, loin d’être un fardeau, devient une lumière diffuse, obstinée et profondément nécessaire. Léa Belooussovitch Fresque commémorative des attentats de Paris ‘Paris, France, vendredi 13 novembre 2015 command : Ville de Paris co-réalisation : Hypermur & Collectif Le Réseau 19 Rue Léon Frot, 75011 Paris, France Léa Belooussovitch, fresque commémorative des attentats ‘Paris, France, vendredi, 13 novembre 2015’, work in progress, (c) Ville de Paris, (c) photo Guillaume Bontemps, Boombartstic Art Magazine Léa Belooussovitch – Hypermur – WIP, fresque commémorative des attentats ‘Paris, France, vendredi 13 novembre 2015, (c) Collectif Le Réseau pour Hypermur, Boombartstic Art Magazine Léa Belooussovitch, fresque commémorative ‘Paris, France, vendredi, 13 novembre 2015’, work in progress, (c) Ville de Paris, (c) photo Guillaume Bontemps, Boombartstic Art Magazine Léa Belooussovitch, fresque commémorative ‘Paris, France, vendredi, 13 novembre 2015’, work in progress, (c) Ville de Paris, (c) photo Guillaume Bontemps, Boombartstic Art Magazine Léa Belooussovitch, fresque commémorative des attentats ‘Paris, France, vendredi, 13 novembre 2015’, work in progress, (c) Ville de Paris, (c) photo Guillaume Bontemps, Boombartstic Art Magazine Auteur Eric Mabille "J’adore bouger et mon rapport à l’art est dans le mouvement, l’instinct et l’instant et ce depuis toujours. J'aime ce côté spontané, libéré de toute connaissance préalable, en vrai autodidacte. J’apprécie aussi pleinement le moment privilégié d’une preview presse, où seul dans une salle d’exposition, j’ai cette impression d’avoir toutes les œuvres pour moi. » Eric Mabille est diplômé en marketing, passionné de web, spécialisé en gestion de projets culturels et en marketing de destination et de niche. Il fréquente depuis plusieurs années l’atelier de dessin et les cours de chant lyrique à l’Académie de Saint-Gilles.