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Belgitudes, la collection Maurice Verbaet s’expose au LAAC à Dunkerque

Belgitudes, la collection Maurice Verbaet s’expose au LAAC à Dunkerque

Le LAAC vibre de ces Belgitudes, une centaine d’œuvres choisies parmi les 8000 œuvres que compte la collection de l’Anversois Maurice Verbaet. Une exposition qui célèbre la création belge de l’après-guerre à la moitié des années 70. A voir au LAAC – Lieu d’Art et Action Contemporaine de la Ville de Dunkerque jusqu’au 9 octobre 2022.

De l’abstraction géométrique au Pop art, en passant par les expressions gestuelles abstraites ou figuratives, l’exposition met en valeur le regard subjectif d’un collectionneur passionné. Cette collection éclectique offre ainsi un pendant remarquable à celle du LAAC portant sur la même période en France et forgée par le fondateur du musée, Gilbert Delaine.

Belgitudes – choix d’un collectionneur

La riche collection de Maurice témoigne en peintures, sculptures, installations de l’effervescence d’une scène artistique active mais méconnue et d’une création belge en plein renouveau durant les Trente Glorieuses.
En 1989, à l’âge de 40 ans, Maurice Verbaet – amateur d’art précoce aussi curieux que passionné – délaisse la finance pour se consacrer exclusivement à l’achat d’œuvres d’art. Son intérêt se porte d’abord sur l’avant-garde des années 1880 à 1940 puis sur l’art après 1945.

Belgitudes reflète de la diversité des styles, des matériaux, des sujets, des couleurs, la multitude des courants, vu par un regard curieux de tout, posé par un collectionneur : Maurice Verbaet. Ne voyez dans cette exposition aucune tentative de définir un « art belge » Aujourd’hui, à la tête de l’une des principales collections particulières anversoises, Maurice Verbaet n’a qu’un seul désir, celui, en faveur d’expositions de « montrer au plus grand public ce qu’est l’art belge » Diffuser, témoigner avec émotion.

Un itinéraire en quatre salles organisées thématiquement et intitulées : « Plans / couleurs / mouvement », « Dénaturer », « Signes, gestes et matières  » et « Pop ».

Belgitudes – Plans, couleurs et mouvement

La première partie de l’exposition est consacrée à l’Abstraction géométrique, rigoureuse avec ses formes construites, ses aplats de couleurs vives conjoints ou superposés et ses compositions rythmiques. Il évoluera par la suite vers la recherche du mouvement réel ou produit par des jeux optiques.

Héritier du Bauhaus et du constructivisme russe, Jo Delahaut fut le 1er artiste de La Jeune Peinture Belge à passer, dès 1947, à l’abstraction. Co-fondateur des groupes bruxellois Art Abstrait en 1952 et Art Construit en 1960, il théorise sa démarche et publie le manifeste du Spatialisme avec Paul Bury, Elno et Jean Séaux en 1954. Prenant ses distances vis-à-vis de l’expressionnisme abstrait, du tachisme et de l’informel, il affirmera dans ses œuvres un sens construit par la confrontation de vastes aplats de couleurs pures sur toile.

Faisceau de traits rectilignes sur fond bleu uni. Verticalité comme symbole et motif récurrent de vie dans l’œuvre de Luc Peire. Construction stable rythmée par les lignes offre à la peinture toute sa vibration.

Le Louviérois Paul Bury insuffle à la forme, dynamisme mouvant et animation. Ses ‘Plans mobiles’, objets imaginaires mus par un moteur électrique sont expression d’une peinture en mouvement et d’une œuvre qui désormais sera cinétique.
Optique, cette toile de Walter Leblanc. Une trame de fils de coton blancs, irisés de légers accents bleutés, torsadés sur fond blanc. Et la toile, subtilement par la variation de la lumière, l’ombre portée de ces fils se détachant sur leur support et les mouvements du spectateur, révèle sa troisième dimension.

Au-delà d’une surface tactile de cuir blanc, une exploration sans-titre de l’espace au-delà et de la profondeur optique née de multiples perforations donnant aux creux et au vide son existence chez Henri-Jean Gabriel.

En regard, le minimalisme de la peinture devenue objet et ces lignes verticales répétées et sérielles de Marthe Wéry et les abstractions corporelles et figuratives d’Antoine Mortier tracées à la brosse de lignes fortes et vives.

Belgitudes – Figurer, refigurer, défigurer, quand la figuration se mêle à l’abstraction

Plus loin, c’est un art figuratif qui se réinvente après-guerre, fusionnant expressionnisme, art brut et abstraction. Compositions hybrides que ces paysages et portraits influencés par les dessins d’enfants, ‘l’art des fous’ et les arts traditionnels. Fougueuses, énergiques, tantôt calligraphiques ou lyriques dans une turbulence des couleurs, ces toiles semblent résulter d’une urgence à renaître, à revenir aux origines de l’art. L’abstraction n’a évidemment pas remplacé la figuration. Faisant fi de son réalisme, elle cherchera une autre manière de s’exprimer.

Parallèlement et en opposition à la rationalité de la pure abstraction géométrique, des artistes ont poursuivi une démarche artistique en prise directe avec leur propre subjectivité. Les deux salles centrales de l’exposition témoignent de ces tendances, la première s’attachant à des expressions figuratives, la seconde à une gestualité plus abstraite.

Née de recherches matiéristes, pariétale comme du temps de la Préhistoire, la peinture pâteuse faite d’empreintes, de grattages et de rugosités de René Guiette – qui fut membre de la Compagnie de l’Art Brut après sa rencontre avec Jean Dubuffet en 1948. Dimension mystique d’un homme-menhir émergeant d’une peinture à l’huile où s’invite le sable.
Chez Serge Vandercam, un bestiaire bien inquiétant et mystérieux semble jaillir de la toile.

Belgitudes – Signes, Gestes et Matières

La salle suivante poursuit l’exploration de l’abstraction par lien qu’elle entretient avec la peinture gestuelle. Spontanéité du mouvement, écriture automatique et vocabulaire de signes proche de la calligraphie sont au centre d’une pratique que le l’on retrouve notamment chez les artistes issus de la mouvance CoBrA belge, comme Christian Dotremont, Pierre Alechinsky, Serge Vandercam ou Englebert Van Anderlecht.

Cobra parmi les Cobra, Christian Dotremont fait dialoguer poésie et dessin dans ses compositions calligraphiques tracées à l’encre de chine noire sur papier blanc. Des logogrammes fusion du langage des signes et la gestualité graphique.

D’autres œuvres témoignent d’une recherche spécifique sur la matière picturale et sa capacité expressive, tel Marc Mendelson. Prédominance de la texture et de ses aspérités sur une toile monochrome de couleur terre. Sur une surface griffée de ce qui semble langage, l’ébauche d’une figure de guerrier, l’épée baissée après la défaite.

Cette tactilité dans la peinture est mise en parallèle plus loin avec les recherches sculpturales singulières, à partir de textiles tissés et noués, développées par l’artiste d’origine polonaise Tapta. Représentante de ‘La Nouvelle Tapisserie’, elle retravaille ce médium de manière sculpturale et monumentale. Ses recherches l’amèneront par après à donner vie à un nouveau matériau, le néoprène (Caoutchouc synthétique épais mais léger, rigide mais aussi élastique, résistant, et surtout thermorégulateur.) pour développer une série des sculptures molles, dont deux exemples ont pris place, depuis juin, dans le jardin des sculptures du LAAC.

Leurs font échos, l’assemblage de lattes brûlées de Vic Gentils – pérennisation de ce qui est en train de disparaître -, et le géométrisme abstrait et fragile des motifs sur ardoises de Raoul Ubac.

Belgitudes – Plastique, érotique, médiatique

L’exposition se conclut avec une dernière section consacrée aux représentants belges du mouvement Pop. Bien qu’éphémère et souvent mal-connu car peu présent dans nos collections publiques, il occupera pourtant une place importante sur la scène artistique belge au tournant des 60’s.

Des œuvres distillant figuration traditionnelle, Nouveau Réalisme français et Pop Art américain et anglais, reprenant les codes et couleurs de la publicité, dans une évocation de la société de consommation et de ses dérives, de l’Uber-érotisation du corps féminin et du culte de l’objet.

Louis-Marie Londot représente la réalité quotidienne des 60’s. Des sujets simples, proches de l’anecdote, affirmés en couleurs. Figures, voitures, espaces de vie et de lieux de consommation cernés large et en couleurs. Mise à plat des perspectives et d’une profondeur rabattue dans le plan.

Icône de notre pop art belge, Evelyne Axell remplace la toile par le Plexiglas, la peinture à l’huile par la peinture émaillée pour voiture. Célébration du féminin dénudé et sensuel posé sur fourrure synthétique. Axell s’approprie les stéréotypes du corps féminin érotisé par la publicité et le regard masculin le mettant en résistance, tel l’étendard d’un corps et d’un intime politiques en phase avec les revendications féministes de l’époque.

Œuvres hybrides chez Cel Overberghe. A mi-chemin entre figuration et abstraction, ses sculptures molles et fluides qui ne sont pas sans rappeler celles de l’artiste Pop américain Claes Oldenburg.

Belgitudes – artistes présentés dans l’exposition

Francis Olin, Paul Van Hoeydonck, Pol Bury, Jo Delahaut, Francine Holley, Léopold Plomteux, Gaston Bertrand, Luc Peire, Willy Anthoos, Walter Leblanc, Henri Gabriel, Marthe Wéry, Jean Rets, Guy Vandenbranden, René Guiette, Roger Raveel, Maurice Wyckaert, Serge Vandercam, Fred Bervoets, Antoine Mortier, Yvan Theys, Marc Mendelson, Tapta, Christian Dotremont, Pierre Alechinsky, Englobent Van Anderlecht, Jean Dypréau, Ralph Cleeremans, Vic Gentils, Bert De Leeuw, Raoul Ubac, Jan Saverys, Eva Herbiet, André Willequet, Cel Overberghe, Guy Baekelmans, Louis-Marie Londot, Mi Van Landuyt, Evelyne Axell, Pol Mara, Lukas Kurzatkowski.

Commissariat de Sybille Cosyn et Hanna Alkema
L’exposition est accompagnée d’un magnifique catalogue édité chez MV Editions avec des textes de Michel Draguet et Hanna Alkema.

Le LAAC – bientôt 40 ans

Le LAAC fêtera à partir du 19 novembre et jusqu’au 7 mai 2023, ses quarante ans d’existence. L’occasion d’un renouvellement de la présentation permanente et d’une invitation à explorer la vie et les coulisses du musée. En attendant, c’est encore le moment de profiter des « Incontournables » représentant les principales tendances artistiques entre 1950 et 1980. Et l’automne étant une saison particulièrement propice pour se promener, les sculptures sont à découvrir au cœur d’un écrin de verdure de 4 hectares.

Belgitudes
Collection Maurice Verbaet
LAAC – Lieu d’Art & d’Action Contemporaine
302 avenue des Bordées
59140 Dunkerque
jusqu’au 09 octobre 2022
du mardi au vendredi, de 09h à 18h
le week-end, de 11h à 18h
https://www.musees-dunkerque.eu/

 

Belgitudes
Exposition Belgitudes, collection Maurice Verbaet, LAAC, Dunkerque, vue de l’extérieur du musée, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Evelyne Axell, Portrait de la Dame aux yeux bleus, 1970, fourrure, plexiglas et émail, Collection Maurice Verbaet, (c) ADAGP, Paris, 2022, Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

Belgitudes
Exposition Belgitudes, Luc Peire, Aleksandre, 1981, collection Maurice Verbaet, LAAC, Dunkerque, (c) courtesy Collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC Dunkerque, Maurice Leblanc, Twisted Strings, 1962, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Belgitudes, Henri Gabriel, sans-titre, 1964, collection Maurice Verbaet, LAAC, Dunkerque, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Pol Bury, Composition, 1952, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Tapta, sans-titre, 1973, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Marc Mendelson, Le Guerrier dépité, 1964, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Pol Bury, Plan mobile, 1953, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles

 

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Exposition Belgitudes, LAAC, Dunkerque, Cel Overberghe, sans-titre, 1970, collection Maurice Verbaet, (c) courtesy collection Maurice Verbaet, (c) photo Boombartstic Art Magazine, Bruxelles.

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