Background

Georges Rousse, au Hangar : À la Conquête du Cercle Parfait

Georges Rousse, au Hangar : À la Conquête du Cercle Parfait

Dans des décors délaissés, Georges Rousse fait surgir des dizaines de cercles qui, tels de grands soleils, s’élèvent et se construisent à la force du regard bien placé que l’on pose sur eux. ’Rising Circles’, une exposition à voir au Hangar – Photo Art Center de Bruxelles, jusqu’au 16 décembre 2023.

Dans l’univers captivant de Georges Rousse, les lieux abandonnés se métamorphosent en ateliers éphémères propices à la méditation et à l’expression artistique. Ces sanctuaires dépourvus d’attrait architectural deviennent des toiles de jeu où il explore minutieusement les traces du passé. Héritier d’une enfance en zone frontalière, Rousse voue une fascination persistante aux blockhaus, immortalisant leur présence à travers ses clichés et s’inspirant de l’ampleur parfois monumentale de ces espaces déserts.

Au cœur d’une contemplation méticuleuse de la lumière, de l’architecture, et des subtilités environnementales, surgit dans l’esprit de Georges Rousse une forme circulaire. Ses aquarelles préliminaires anticipent la métamorphose imminente de ces lieux.

Au sein de l’exposition mondiale « Rising Circles » au Hangar, la chronologie, la couleur et la typologie des espaces s’effacent devant la singularité du cercle, symbole puissant qui se dessine au fil des décennies d’œuvres de l’artiste. Une rétrospective immersive, conviant les spectateurs à contempler l’instant précis et à définir l’angle de vision, là où la mémoire d’un lieu se réduit à l’essence symbolique d’un cercle.

Georges Rousse, tableaux d’une exposition

Lors de sa première incursion au Hangar, l’œil aguerri de Georges Rousse est immédiatement captivé par le puit de lumière et le toit en oblique qui caractérisent l’espace d’exposition du premier étage. Dans un élan créatif spontané, il entrevoit l’ajout d’un cercle, bravant ainsi l’orthogonalité rigide et l’inclinaison du toit. Pour en enrichir la luminosité ambiante, il l’infuse habilement d’un jaune de surface. Une composition en apparence morcelée qui révèle son unité lorsque l’observateur choisit judicieusement son emplacement sur l’escalier en vis-à-vis. Une déambulation dans l’espace telle une invitation incitant le spectateur à reconstituer la forme parfaite.

À l’âge de 75 ans, Georges Rousse persiste à émerveiller par ses installations quadraturistes. En tant qu’architecte, dessinateur, plasticien et photographe, il exerce une maîtrise totale sur chaque facette de son œuvre. Chacune de ses créations narre une histoire singulière, qu’il s’agisse de la résurrection d’éléments divers du cercle au cœur des caves à Champagne de Reims, ou de la confection d’une mosaïque chromatique dans les entrailles d’une ancienne centrale électrique en Allemagne.

Une autre œuvre, nichée au sein de la demeure d’un boulanger en France, engage des jeunes en situation difficile dans une initiation à l’art, les éloignant ainsi des méandres de la société et des institutions qui les encadrent. Georges Rousse manie avec ingéniosité des formes simples pour donner naissance à des espaces mentaux divers, dévoilant des surfaces d’un sol en terre cuite minutieusement découpé et des ouvertures soigneusement conçues pour accueillir la lumière. Fervent défenseur de la collaboration, il encourage la réalisation collective, offrant à chacun la possibilité de s’approprier l’œuvre ainsi créée.

Guidé par la quête de révéler plus qu’un simple objectif photographique ne peut capturer, Georges Rousse manie avec virtuosité miroirs, vitres et autres artifices, étendant ainsi la perception de l’espace. Confronté à des espaces trop confinés, il découpe les murs, et face à une structure trop figée, il la remodèle. Une halle vouée à l’oubli est alors submergée, accueillant un demi-cercle enflammé dont l’éclat se reflète dans les eaux, recomposant un cercle parfait dans un lieu où la lumière est absente.

Georges Rousse, les couleurs

Tel un peintre maître de sa palette, Georges Rousse tire parti des nuances générées par la décomposition de la lumière à travers un prisme. Il privilégie les teintes saturées, celles que l’objectif photographique ne saisit pas toujours, mettant en avant des rouges feu, des jaunes incandescents solaires et des bleus célestes. Ce choix méticuleux de couleurs se dessine dès les premiers croquis, où la couleur agit comme un catalyseur, intensifiant l’impression d’un collage harmonieux de différents espaces.

Georges Rousse, de l’anamorphose à l’autre monde

« Je réordonne le monde visible en un espace inédit et imprévu.» – Georges Rousse

Georges Rousse, en jouant de l’anamorphose, transcende la photographie en manipulant l’espace visuel. En intervenant dans des lieux désaffectés, il sculpte, peint, et métamorphose l’environnement, dévoilant ainsi une réalité tant poétique que fantastique. Chaque photographie anamorphique invite l’observateur à contempler l’intrusion d’un monde dans un autre, capturant l’essence même de son art.

Les œuvres de Rousse ne sont pas seulement des reproductions fidèles, mais des compositions minutieusement orchestrées qui bannissent les retouches numériques postproduction. En défiant les limites de la perspective et en exploitant les jeux de parallaxe, l’artiste crée des illusions qui donnent l’impression d’une manipulation photographique.

Dans un jeu visuel, de grands cercles émergent, défient notre perception, démontrant que la sincérité artistique réside d’avantage dans la façon dont le cerveau interprète et notre carte du monde que dans la réalité capturée.

Au-delà de la fascination visuelle, en confrontant l’œil contemporain à ses créations, Rousse déroute les attentes habituelles, révélant ainsi la magie de l’anamorphose. Que ce soit à travers des expériences in situ ou des confrontations directes avec ses photographies, l’artiste crée des mondes nouveaux, invitant l’observateur à plonger dans une réalité altérée où perception et créativité se rencontrent.

Georges Rousse, de l’aquarelle à la photo

De lieux abandonnés réinventés en toiles spatiales, dans ces territoires inexplorés, Georges Rousse déambule, traquant les empreintes du passé et les artefacts énigmatiques, tandis que la lumière devient son pinceau, sculptant les ombres et éclairant les recoins oubliés. Peu à peu, une forme circulaire émerge, esquissée avec précaution sur une aquarelle préliminaire, annonciatrice de la métamorphose imminente.

L’œuvre de Rousse, fusion magistrale de photographie et de peinture, s’inspire du Land Art et de l’audace du Carré noir de Malevitch. Ses photographies anamorphiques captent une tridimensionnalité dans un espace réduit à deux dimensions.

Des formes captives, enchâssées dans des structures architecturales, entrelacent un jeu visuel où l’une abrite l’autre, esquissant un chemin d’évasion. Un lieu en apparence ordinaire devient une scène où toutes les projections prennent vie, ou pour certains, devient un sanctuaire de pause méditative, libéré de toute volonté de comprendre le processus, offrant simplement une jouissance contemplative du regard.

Malgré les préparatifs méticuleux, seule la photographie persiste, témoin éternel de l’éphémère transformation avant le retour à l’ordinaire ou à la destruction. Georges Rousse, explorateur d’âmes architecturales, transcende les lieux, conférant à l’espace une dimension autre, élargissant ainsi les frontières de l’expérience esthétique.

Georges Rousse, l’émergence du cercle

Au cœur de l’exposition « Rising Circles », le cercle se dévoile tel un symbole d’une richesse incommensurable, façonnant un langage visuel d’une complexité envoûtante. Entre figure géométrique d’une perfection indéniable et icône aux multiples facettes, il transcende les limites de l’espace, évoquant tour à tour la lune, le soleil, la roue de la vie, voire l’objectif capturant l’instant photographique. Tissant des contours variés au sein d’architectures principalement orthogonales, Georges Rousse offre au spectateur une méditation visuelle, où la simplicité tracée à la main s’érige en un miroir de plénitude et de néant.

Pour l’artiste, le cercle devient bien plus qu’une simple forme géométrique, devenant le réceptacle d’une symbolique profonde et évolutive. Érigé en figure parfaite par la géométrie, il se transforme sous la main de Rousse, guidé par l’influence de la méditation Zazen et de la calligraphie japonaise. « Rising Circles » révèle ainsi le cercle comme un condensé visuel, cristallisant l’éclat du soleil, l’œil scrutateur du photographe et l’objectif photographique. Les cercles découpés par Rousse, qu’ils soient physiques ou optiques, révèlent un espace fragmenté qui se recompose avec poésie, dévoilant la puissance cyclique, l’harmonie cosmique et l’union entre la géométrie et la spiritualité méditative.

Georges Rousse, la review Boombartstic

Georges Rousse, maître de la transformation artistique, s’engage de manière radicale sur ses structures, les métamorphosant par la peinture, le dessin, ou la création d’opérations visuelles éblouissantes. Ses photographies captent des formes parfaites, révélant l’invisible de manière quasi-surnaturelle, invitant le spectateur à questionner le point de vue précis nécessaire pour appréhender pleinement l’œuvre. À travers cette exposition, il nous rappelle que chaque image naît d’un travail actif et conceptuel, faisant de la transformation du réel un acte artisanal.

Dans un syncrétisme culturel, Georges Rousse explore des lieux en transition où passé, présent et futur se connectent, symbolisés par le cercle, représentant le continuum de l’existence. En tant qu’artiste multidisciplinaire, il résiste à toute classification, tout comme ses œuvres énigmatiques, des photographies qui conservent la trace de ses anamorphoses peintes dans des espaces voués à la destruction. Ces créations résistent à une compréhension hâtive, demandant une contemplation approfondie.

L’œuvre de Rousse célèbre l’art de la perspective et de l’anamorphose, élevant des lieux bruts en véritables écrins qui préservent leur essence. En mettant en lumière des lieux précaires, rejetés par le temps, il offre une nouvelle vie éphémère à travers l’art, arrêtant le temps dans des images où se mêlent les traces du passé et l’empreinte artistique, suscitant une méditation profonde sur le temps, la mémoire et l’oubli. C’est une célébration de l’acte de voir, invitant le spectateur à être un observateur actif de sa propre faculté visuelle.

Georges Rousse, BIO Expresse

  • né en 1947 à Paris où il vit et travaille,
  • à ses 9 ans, reçoit un Brownie Flash de Kodak, appareil photo n’a plus quitté,
  • étudiant en médecine à Nice, il décide d’apprendre chez un professionnel les techniques de prise de vue et de tirage puis de créer son propre studio de photographie d’architecture.
  • sa passion le pousse à se consacrer entièrement à une pratique artistique de ce médium,
  • avec la découverte du Land Art et du Carré noir sur fond blanc de Malevitch, choisit d’intervenir dans le champ photographique établissant une relation inédite de la peinture à l’Espace,
  • investit alors des lieux abandonnés pour les transformer en espace pictural et y construire une œuvre éphémère, unique, que seule la photographie restitue,
  • depuis sa première exposition à Paris, à la galerie de France en 1981, Georges Rousse n’a cessé d’exposer et d’intervenir dans le monde entier, en Europe, en Asie (Japon, Corée, Chine, Népal.), aux Etats-Unis, au Québec, en Amérique latine…,
  • a participé à de nombreuses biennales – Biennale de Paris, Biennale de Venise, Biennale de Sidney,
  • a reçu des prix prestigieux : Villa Médicis ‘Hors les Murs, New York (1983), Villa Médicis, Prix de Rome (1985-1987) ; Prix ICP International Center of Photography, New York (1988) ; Prix du Dessin du Salon de Montrouge (1989) ; Grand Prix National de la Photographie, Paris (1993),
  • Georges Rousse succède à Sol LeWitt comme Membre associé de l’Académie Royale de Belgique (2008),
  • il est représenté par plusieurs galeries européennes et ses œuvres font partie de collections majeures.

 

Georges Rousse
Rising Circles
Hangar 
Photo Art Center
18 Place du Châtelain
1050 Bruxelles
jusqu’au 16 décembre 2023
du mardi  au samedi, de 12h à 18h
https://www.hangar.art/

 

Georges Rousse, Argentan, 1997, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Argentan, 1997, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Santander, 2006, cercle noir dans pièce en béton rythmé par des colonnes en béton, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Santander, 2006, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Montréal, 1997, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Montréal, 1997, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, croquis pour l'installation au Hangar, Bruxelles, 2023, exposition Rising Circles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, croquis pour l’installation au Hangar, Bruxelles, 2023, exposition Rising Circles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Madelaine-sous-Montreuil, 2014, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Madelaine-sous-Montreuil, 2014, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Reims, 2012, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Reims, 2012, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo Eric Mabille, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Chasse-sur-Rhône, 2010, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Chasse-sur-Rhône, 2010, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Lens, 2017, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Lens, 2017, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, vue de l'exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo courtesy Be Culture, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, vue de l’exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) Georges Rousse, (c) photo courtesy Be Culture, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Tokyo, 2017, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Tokyo, 2017, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Vitry, 2007, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Vitry, 2007, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

Georges Rousse, Bruxelles, 2023, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine
Georges Rousse, Bruxelles, 2023, exposition Rising Circles, Hangar, Bruxelles, 2023, (c) et (c) photo Georges Rousse, Boombartstic Art Magazine

 

 

Related Stories

Leave a Comment

Leave A Comment Your email address will not be published